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Clément Méric

Etudiant à Sciences po. - 2012/2013

Syndicaliste Solidaires étudiants - 2012/2013

Militant Action Antifasciste Paris-Banlieue (AFA) - 2012/2013

Assassiné par l'extrême droite le 5 Juin 2013 à Paris

"Nous espérons que la vérité soit dite publiquement sur les circonstances de l’agression et que la dimension politique de cette agression soit clairement affirmée.

 

Il est insupportable que l’on cherche à dépolitiser l’action antifasciste et à réduire ce combat militant à la recherche de la confrontation physique.

Oui, nos fils, nos frères, nos camarades nous manquent, et si leur absence est si douloureuse, c’est parce qu’ils sont omniprésents dans nos esprits et nos cœurs. Non pas pour nous empêcher de vivre, mais, au contraire, pour nous bousculer et nous appeler à vivre autrement".

Ceci est le portrait de Clément par ses parents Agnes et Paul-Henri Meric

lors de la commémoration pour « Carlos Palomino - 10 ans sans toi, 10 ans avec toi »

- Madrid 11 novembre 2017-

 

Qui était Clément ?

Il était très jeune, et très investi dans l’action antifasciste.

Il avait 18 ans au moment de sa mort, en juin 2013 à Paris.

C’était un jeune joyeux, affectueux, espiègle, plein d’humour, subtil dans ses analyses de notre monde, engagé et responsable.

Il a grandi avec nous à Brest, « Brest la rouge », en Bretagne. Une ville ouvrière, ayant longtemps vécu autour de son arsenal et souffrant de sa quasi-fermeture.

Une ville où il a découvert les milieux militants anarchistes qui répondaient à son appétit d’engagement politique, notamment la CNT (syndicat confédération nationale du travail) que connaissent bien les Espagnols.

 

CNT (Confédération Nationale du Travail)

Se référant à l’anarcho-syndicalisme et au syndicalisme révolutionnaire, la CNT d’aujourd’hui oscille entre la reconnaissance d’un projet communiste libertaire et le refus de toute étiquette spécifiquement idéologique : pas d’organisation politique, de quelque obédience qu’elle soit, comme tutrice de l’organisation syndicale. Une logique d’adhésion qui est fondée sur l’appartenance de classe. Mais une proximité indéniable avec un certain courant du mouvement libertaire, qui s’explique par le mode de fonctionnement et les grands principes fondamentaux : contrôle des négociations par la base, assemblées générales souveraines, refus des permanent-es syndicaux-ales, refus des hiérarchies salariales, délégué-e-s élu-e-s et révocables, autogestion des luttes...

 

Dès l’âge de 14 ans, il participait aux mouvements contre les réformes mettant en cause les acquis sociaux. Il participait aussi aux activités de collectifs autogérés : bar autogéré, cantine populaire, squat de quartier. Il y organisait avec d’autres des rencontres festives ou des débats sur des thèmes politiques (la question des ZAD, notamment celle de NDDL près de Nantes). Il y expérimentait la solidarité.

Il aimait la musique. Il était amateur de musique jamaïcaine, de ska, de Rn’B et de early soul. Il était guitariste dans un groupe. A ses heures, il faisait le DJ dans des petits festivals et sur les places publiques… Il avait à cœur de rendre la vie plus joyeuse pour tous, y compris pour les vieux joueurs de boules de la place voisine de chez nous.

C’était un garçon brillant à l’école, mais il le cachait bien, tellement il était soucieux de ne pas écraser ceux qui avaient plus de difficultés.

En 2011, Clément est tombé gravement malade. Il avait une leucémie. Il a vécu, comme tous ces malades, des choses difficiles : hospitalisation en chambre stérile, chimiothérapie, multiples ponctions lombaires…

 

Clément a vécu tout cela avec beaucoup de courage. Il ne se plaignait pas et continuait à porter son message politique et à jouer de la musique. C’était tellement important pour lui qu’il avait réussi à faire entrer sa guitare dans sa chambre stérile, après d’âpres négociations avec les médecins du service !

 

La maladie ne l’a pas empêché de poursuivre normalement ses études. Des professeurs de son lycée l’aidaient à l’hôpital et à la maison.

Il était en rémission et son traitement était sur le point de s’arrêter lorsqu’il a été tué en 2013.

En septembre 2012, il est parti faire ses études à Paris, à Science po (grande école de sciences politiques).

 

Il était très critique à l’égard de ce qui s’y enseignait et y voyait surtout un mécanisme de reproduction des élites. Mais il était désireux de se doter d’un solide bagage pour agir politiquement. Il aimait surtout l’histoire et la sociologie.

Et, à Paris, il a continué à militer. Ses camarades le décrivent comme un militant infatigable. C’est à travers eux que nous connaissons plus précisément ses engagements (sur lesquels il était discret).

Il n’y avait pas de section de son syndicat, la CNT, à Sciences po. Il a donc participé à la reconstitution d’une cellule Solidaires étudiants (syndicat d’extrême gauche). Membre de l’Action antifasciste Paris Banlieue. Il était aussi membre de l’AFA Paris Banlieue.

Il participait à des actions en faveur des sans papiers et pour les droits des femmes.

Action antifasciste Paris-Banlieue

Organisation antifasciste qui se fixe comme objectifs de connaître, analyser et combattre les organisations et modes de pensée qualifiés d’extrême droite.

​Fondamentalement, Clément était un antifasciste enthousiaste et exigeant.

Il avait en horreur toutes les formes d’injustice et de discrimination, toutes les formes d’exploitation et de domination, toutes les atteintes à l’autonomie et à la liberté.

Il militait activement contre l’extrême-droite, contre les violences policières, contre l’homophobie, contre l’islamophobie, contre le racisme…

 

Il était anticapitaliste, antisexiste (très critique à l’égard de certaines attitudes virilistes observées jusque dans les milieux militants), antispéciste (il dénonçait l’exploitation animale)…  Cela fait beaucoup d’anti…

 

Mais Clément participait aussi à la construction d’une société différente fondée sur une éthique libertaire.

 

Il était idéaliste, et se donnait les moyens d’une vraie réflexion politique (par ses études et ses lectures). Il aimait les échanges d’idées, les discussions constructives. Il était ferme dans ses convictions mais attentif à celles des autres.

 

Il était soucieux de cohérence et d’intégrité dans ses engagements : il était végétarien, il avait adopté un mode de vie frugal.

 

Il refusait l’entre-soi, notamment celui des élites qu’il côtoyait à Sciences po.

Il était convaincu que les luttes politiques ne pouvaient pas se contenter des moyens d’action traditionnels, trop dévalués. Comme beaucoup de ses camarades, il pensait qu’il fallait investir d’autres domaines pour créer des espaces de résistance, notamment les tribunes de foot et les contre-cultures, en particulier musicales.

 

Selon le témoignage de ses amis militants, il était soucieux de permettre l’expression et la participation de tous ; il ne cherchait jamais à se mettre en avant, mais contribuait au débat lorsqu’il avait quelque chose à y apporter.

 

Il était convaincu, non seulement de la nécessité de la lutte, mais de la nécessité de l’auto-organisation à la base, Il croyait en l’éducation populaire et en l’auto-défense populaire.

Son élégance (on pourrait peut-être dire sa coquetterie), y compris sur le terrain vestimentaire, qui lui a coûté cher et qui sera raillée…

Dans quelles circonstances est-il mort ? C’était un bel après-midi de juin 2013.

Après son travail (il travaillait dans un Quick en complément de ses études), Clément avait rendez-vous avec des amis, militants antifascistes comme lui, dans une vente privée de vêtements en plein cœur de Paris.

 

Ses trois amis, qui étaient arrivés avant lui, avaient croisé un groupe de Bonehead (skinheads néo nazis) dans la vente. Ces Boneheads portaient des tenues caractéristiques et arboraient des messages racistes sur leur T shirt. Deux camarades les ont vus ranger un poing américain dans leur sac avant de le déposer à la consigne. Plus tard, un vendeur dira qu’il a vu un des Bones faire faire un salut nazi à un mannequin.

 

L’un des camarades de Clément, scandalisé, leur a manifesté son opposition en les traitant de nazis, puis le groupe d’antifas est sorti. Ils ont ensuite attendu dans la rue, à quelques dizaines de mètres du local de la vente, que Clément arrive et que les Boneheads  sortent pour que Clément puisse faire ses courses tranquillement.

 

Pendant ce temps, dans le local, les Boneheads ont appelé à la rescousse. Ils prétendent qu’ils avaient peur d’être agressés par le groupe d’antifas, qui les aurait menacés. Esteban Morillo, celui qui tuera Clément, est arrivé pour les aider.

 

Un vigile leur avait indiqué qu’ils pouvaient regagner le métro sans passer devant le groupe d’antifas en sortant de l’immeuble vers la droite. Les trois Boneheads sont pourtant sortis dans la direction du groupe de Clément, en laissant la fille qui les accompagnait partir dans l’autre direction avec les sacs.

 

Alors qu’il y avait plein de monde dans la rue, ils se sont approchés des antifas qui étaient adossés contre le mur d’une église et les ont agressés. La bagarre a été très violente.

 

Esteban Morillo admet qu’il a frappé Clément le premier, au visage, prétendant qu’il se sentait menacé. Clément n’avait pourtant pas un physique menaçant avec ses 66 kg pour 1m80, car la maladie l’avait affaibli. Le groupe des antifas a tenté de se défendre.

 

Après avoir reçu d’autres coups au visage, Clément est tombé, sans connaissance. Il n’a pas pu être ranimé, malgré l’intervention rapide des secours. Le groupe de Boneheads a alors pris la fuite.

Les amis de Clément et plusieurs passants témoignent du fait qu’Esteban Morillo était armé d’un poing américain. Celui-ci le nie. C’est une question importante dans la procédure car l’usage d’un poing américain démontre clairement l’intention d’agresser.

Il y a eu plusieurs expertises médicales. Les premières expertises, qui reconnaissaient que les marques de coup sur le visage de Clément évoquaient l’usage d’un objet métallique, n’étaient pourtant pas très concluantes. Le problème venait du rapport d’autopsie qui avait affirmé que les os du nez n’étaient pas cassés, ce qui rendait moins évident l’usage d’un poing américain.

 

Mais une nouvelle expertise sur la base du scanner effectué après la mort de Clément a clairement mis en évidence la fracture des os du nez. Elle a réaffirmé que Clément avait reçu au moins trois coups très violents, et que les traces évoquaient fortement l’usage d’un objet métallique.

 

Ces constatations et les divers témoignages nous semblent concluants.

Par ailleurs, Samuel Dufour, un des Boneheads, s’est vanté le soir même dans un SMS d’avoir frappé avec un poing américain et d’avoir envoyé un antifa à l’hôpital. Sa participation effective aux coups portés à Clément reste incertaine, mais nous considérons qu’il s’agit d’une action collective et que chacun est responsable de la mort de Clément.

 

L'agression doit être resituée dans le contexte politique du moment en France. C'est-à-dire un puissant mouvement d'opposition conservatrice à l'adoption du mariage homosexuel. Il y a eu une série d'importantes manifestations à Paris au printemps 2013 (la Manif pour tous, répondant au mariage pour tous). Cette mobilisation des droites et des extrêmes droites a favorisé l'activisme d'extrémistes et la multiplication des violences homophobes ou racistes.

 

 

 

 

(Militants nationalistes d’extrême droite lors d'un rassemblement de la "Manif pour tous" à Toulouse en avril 2013)

Qui étaient plus précisément les agresseurs de Clément et de ses camarades ?

Ils étaient tous membres d'un groupuscule néofasciste ultranationaliste, le mouvement Troisième voie. Estéban Morillo, l'un des deux principaux accusés et le meneur du groupe, y exerçait même des responsabilités.

 

Estéban Morillo est né à Cadix en 1992, d'une mère française et d'un père espagnol, puis s'est installé avec ses parents en Picardie, à moins de 100 km de Paris. Il a tôt manifesté publiquement des sympathies néonazies.

 

Le maire de son village s'était plaint auprès de la gendarmerie de ses provocations vestimentaires, ses tatouages et ses saluts nazis. Pour des raisons semblables, il avait été exclu de sa formation d'apprenti boulanger, et son activité sur internet avait donné lieu à une enquête de police. Venu à Paris, il travaillait comme vigile dans une entreprise de sécurité privée.

 

Le second des principaux accusés, Samuel Dufour, également apprenti boulanger, présente un profil tout à fait similaire.

 

Le mouvement Troisième voie avait pour chef Serge Ayoub.

Ce quinquagénaire est apparu sur la scène publique dans les années 80 comme chef de bande de Boneheads parisiens d’extrême-droite. Il était surnommé Batskin en raison de son usage des battes de base-ball pour affronter ses adversaires.

(Serge Ayoub dit Batskin au centre)

 

Son parcours aventureux dans les marginalités de l'extrême droite radicale est fait d'aller-retour entre action politique et activité commerciale (y compris la production de films pornographiques, ou un trafic de drogue qui lui a valu un passage en prison). Il a à plusieurs reprises collaboré avec le Front national, notamment pour des activités de service d'ordre.

 

En 2010, l’ancien skinhead réactive le mouvement Troisième voie, un groupuscule d'inspiration néo-fasciste en sommeil depuis 20 ans. Il se définit comme nationaliste-révolutionnaire, anticommuniste, anticapitaliste. Son slogan : « Ni trusts, ni soviets ». Il cherche à s’implanter dans les couches populaires.

(Serge Ayoub chef des JNR)

 

Conjointement, Ayoub redonne vie aux Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), une garde rapprochée d'une trentaine de gros bras devant obéissance absolue au chef. Leur slogan « Croire, combattre, obéir » est repris du fascisme italien dont ils reproduisent les codes de fonctionnement.

Lien : (JNR par Reflex.e.s)

 

Ces organisations ont été dissoutes par le gouvernement en juillet 2013 en tant que « milices privées » qui « propagent une idéologie incitant à la haine et à la discrimination envers les personnes à raison de leur non-appartenance à la nation française et de leur qualité d'immigré », autrement dit pour racisme et xénophobie, et recours à la violence.

 

Plusieurs groupes d'extrême droite dissous en conseil de ministres : Un mois après la mort de Clément Méric, trois organisations présentant "les caractéristiques de milices privées" incitant à "la discrimination et à la haine" ont été dissoutes. (par Le Monde le 10.07.2013)

 

Depuis cette dissolution et l'ouverture de poursuites contre les responsables la mort de Clément, S. Ayoub et une partie de sa bande se sont mis au vert en Picardie et reconvertis en un club de motards où ils organisent des concerts. Ayoub fait encore, occasionnellement, des apparitions sur la scène politique de la droite radicale.

 

Au lendemain de la mort de Clément, sur les plateaux de télévision qui lui offraient une tribune, Ayoub prétendait impudemment ne rien savoir de ses agresseurs. Or, il a été en contact téléphonique avec E. Morillo immédiatement avant et immédiatement après l'agression. Tout le groupe s’est retrouvé plus tard autour de lui dans le bar qu'il tenait à l'époque. Là, ils ont pu s'entendre sur leur version des faits.

 

Les vautours - Publié le 10 juin 2013 dans « feudeprairie ».

« Honte aussi aux médias, de gauche comme de droite, ouvrant leurs plateaux télés aux chefs des groupuscules fascistes qui y font leur publicité librement, comme d’habitude, ayant en plus le culot de se prétendre « anti-système » alors que toute la presse les courtise pour un reportage « choc ». »

 

Nous sommes persuadés que les skinheads de Troisième voie n'ont pas agi sans l'aval de leur chef. Mais faute de preuve, Ayoub n'a pas été inquiété pour la mort de Clément.

 

Esteban Morillo est bien un militant de Troisième Voie : Communiqué de l’Action Antifasciste Paris-Banlieue

 

D'autres agressions

Ces dernières années, l'entourage d'Ayoub a été impliqué dans d'autres affaires criminelles ou de très graves violences.

 

Le 12 novembre 2011, à Lille, dans le nord de la France, on a retrouvé le corps d'Hervé Rybarczyk dans un canal. C'était un guitariste d’un groupe punk, connu comme militant antifasciste. A l'époque, l'affaire avait été classée par la justice. Officiellement, il s'agissait d'un accident ou même d'un suicide. Le dossier à été rouvert au printemps dernier, à la suite de nouvelles révélations. Trois personnes, dont deux étaient membres des JNR, sont poursuivies pour l'avoir attaqué et frappé puis jeté à l’eau. C'était probablement un rituel initiatique d'admission dans la milice de Serge Ayoub pour le principal suspect, nouveau venu aux JNR.

 

Lille : assassinat de notre camarade Hervé Rybarczyk par les identitaires (par La horde)

Cette affaire peut encore connaître des rebondissements. Quatre autres jeunes hommes ont été retrouvés morts dans le canal de Lille entre 2010 et 2011. Le doute pèse désormais sur le caractère accidentel de ces noyades, et l’instruction se poursuit.

Les informations qui ont permis la reprise de l'enquête ont été obtenues à l'occasion d'un autre procès concernant encore des proches de S. Ayoub. Il a eu lieu également au printemps dernier.

Il s'agissait d'un petit groupe d’ultra-droite de Picardie, au nord de la France (encore le pays d'E. Morillo), le White Wolf Klan. Il vivait de vols et de racket. Il avait été fondé par d'anciens membres de Troisième Voie juste après sa dissolution en 2013. C'est son chef qui est actuellement poursuivi pour la noyade de Lille. Les membres de ce groupe très violent étaient notamment accusés de tentative de meurtre à l'encontre d'un autre militant nationaliste, lors d'un sévère règlement de compte. S. Ayoub était lui aussi poursuivi, comme complice. Il était considéré comme le commanditaire du règlement de compte. Le chef du groupe White Wolf Klan a été condamné à 9 ans de prison. Ayoub a été relaxé, faute de preuve suffisante.

 

Plus anciennement, en 2000, deux JNR, bras droits d'Ayoub à l’époque, ont été condamnés à 20 ans de prison pour le meurtre, dix ans auparavant, d'un jeune Mauricien de 23 ans (James Dindoyal) croisé sur une plage de la Manche. Ils l’ont jeté à la mer, après l'avoir forcé à boire un mélange de bière et d'un produit détergent. Il décédera après plusieurs jours d'agonie atroce. S. Ayoub, soupçonné d'être dans le coup, s'en est tiré encore une fois.

 

L'actualité française récente fournit malheureusement d'autres exemples des violences de l'extrême droite.

 

Ainsi, en mai dernier, à Nantes. Deux jeunes de 16 et 18 ans rentraient, de nuit, d'un rassemblement anticapitaliste et antifasciste organisé au soir de l'élection présidentielle qui opposait E. Macron à Marine Le Pen. En chemin, ils ont été agressés avec une violence ahurissante à coups de barre de fer par un groupe qui s'était assuré de leur engagement antifasciste. Ils n'ont été "sauvés" que par l'arrivée d'automobilistes qui a mis les agresseurs en fuite.

L’aîné, laissé pour mort, s’est vu reconnaître une incapacité temporaire totale de travail d’un an. Il ne peut ni se mouvoir ni parler normalement. Il est à craindre que son handicap soit définitif.

 

Les personnes arrêtées et mises en examen sont membres ou proches d'une organisation étudiante d'extrême droite, le GUD, (Groupe union défense), connu pour ses actions violentes. Plusieurs amis proches de Marine Le Pen sont d'anciens dirigeants du GUD.

 

Les réactions

Revenons à l’agression de Clément et de ses camarades en 2013. Sur le coup, la mort de Clément a beaucoup ému en France.

 

Dans les jours qui ont suivi, il y a eu énormément de réactions populaires (plus de 15 000 personnes dans les rues entre les nombreuses villes qui ont organisé des rassemblements ou des manifestations) ; la presse en a beaucoup parlé (l’affaire faisait la une des journaux) et les politiques aussi (y compris le président de la République et le 1er ministre), il y a eu une minute de silence à l’Assemblée nationale, de nombreux politiques sont venus aux manifestations…

 

On a beaucoup parlé des dangers de l’extrême droite (qui montait régulièrement dans les urnes à travers le Front national).

 

La dissolution de groupuscules d’extrême-droite

Comme on l’a déjà dit, le gouvernement a décidé la dissolution de 3ème voie et des JNR (et de deux autres mouvements d’extrême droite violents). Mais ces groupes se sont évidemment reconstitués ailleurs sous d’autres apparences.

 

La manipulation

Cet effroi et cet élan de solidarité n’allaient pas durer.

Trois semaines après la mort de Clément, une grande radio nationale (RTL) annonçait que des caméras de surveillance avaient enregistré la rixe et que la vidéo montrait que les agresseurs n’étaient pas ceux que l’on pensait. L’information était présentée comme étant de source policière.

 

Clément, assassiné une deuxième fois (par le Comité pour Clément)

Le soir même, la télévision publique (France 2) reprenait cette prétendue « information » au journal de 20 h. Elle l’illustrait par une infographie réalisée par un stagiaire (Hugo Clément, qui a acquis depuis une grande notoriété). On y représentait une scène composée de seulement deux personnes : Esteban Morillo se tenant tranquillement au milieu de la rue et Clément arrivant de loin par derrière lui pour l’attaquer. Esteban Morillo, surpris, se retourne et frappe Clément pour se défendre. Clément tombe.

L’effet est évidemment dévastateur. Heureusement, certains journaux enquêtent et obtiennent une autre version des services chargés de l’enquête : il y a bien une vidéo, mais elle ne montre que les pieds ; le point de départ de l’agression est caché et on ne peut absolument pas en déduire que les agresseurs sont les antifas.

 

Une expertise technique plus précise montrera d’ailleurs plus tard que cette vidéo contredit au contraire la thèse des boneheads. Elle montre que Clément et ses camarades ne se sont pas dirigés vers le groupe de skins.

 

L'évolution de l'opinion et du monde politique

Mais le mal est fait dans l’opinion. Et face à ces informations contradictoires, beaucoup de gens se contentent de penser qu’au bout du compte, il s’agit de deux groupes également violents qui ont cherché la bagarre et que celle-ci a mal tourné.

Et c’est évidemment ce que cherchent à faire croire les avocats des néo-nazis.

 

Les politiques « de gauche » prennent également des distances avec leur réaction initiale : leur présence et leur soutien ont souvent été mal accueillis par les militants d’extrême gauche ; la radicalité de la critique de ces militants dérange.

 

Les méfaits des groupuscules d’extrême droite sont de moins en moins présents à l’esprit, d’autant que des conflits violents vont éclater à l’occasion de mouvements de contestation de la politique gouvernementale et entraîner un basculement de la perception de l’antifascisme.

 

La mise en cause de l'antifascisme à l'occasion des mouvements contre la loi travail et contre les violences policières. Procès de la voiture incendiée.

 

En 2015 – 2016, la France connaît une vague de violences dans les manifestations contre les réformes antisociales du gouvernement (notamment la loi travail).

 

Aux actions parfois musclées de certains manifestants (essentiellement de la mouvance autonome constitués en blacks blocs) répondent des violences policières de plus en plus systématiques. La liberté de manifestation est bridée. La plupart des manifestations dégénèrent en affrontements, y compris celle de juin 2016 en mémoire de Clément.

 

La presse, la police, les politiques et l’opinion publique font l’amalgame entre antifascistes et casseurs.

 

Le mouvement antifasciste lui-même se divise parfois sur la stratégie à adopter : maintenir une posture non violente ou assumer une position insurrectionnelle ?

L’épisode de la voiture de police incendiée à Paris en 2016, cristallise les conflits.

Des policiers se rassemblent place de la République (lieu emblématique de la contestation de gauche) pour protester contre le fait qu’ils sont « mal aimés » et victimes d’agressions à l’occasion du mouvement social.

 

Un appel à une contre-manifestation est lancé, mais cette contre-manifestation est interdite au dernier moment. Le mouvement part en manifestation sauvage et croise par hasard une voiture de police. La voiture est bloquée par des manifestants, les vitres sont brisées et les policiers frappés à l’intérieur du véhicule. Un manifestant lance un fumigène dans la voiture, qui prend feu très rapidement. Les policiers sortent et l’un d’entre eux est frappé par un manifestant avec une barre métallique.

 

L’épisode se termine sans blessures significatives, mais les images tournent en boucle sur les médias et les réseaux sociaux.

A l’issue de l’enquête policière, Antonin Bernanos, un ami proche de Clément, est arrêté avec d’autres militants de la mouvance antifasciste. Il nie sa participation aux faits (il admet seulement avoir participé à la manifestation interdite) et les preuves contre lui sont inconsistantes (témoignage anonyme d’un policier qui s’avérera faux sur d’autres points, ressemblance de la couleur de son caleçon avec celle de l’agresseur, ressemblance des silhouettes…). Antonin sera pourtant condamné en octobre 2017 à 5 ans de prison, dont 4 fermes.

Le mouvement antifasciste est aujourd’hui clairement dans le collimateur du pouvoir. L’extrême droite a, hélas, gagné sur ce terrain.

 

Le discours selon lequel les extrêmes se rejoignent et sont à mettre dans le même panier est désormais bien ancré dans une large partie de l’opinion française.

 

Nous avons un gros travail à mener pour déconstruire cette perception. C’est à cela que s’attelle notamment le Comité pour Clément, créé et animé par ses camarades. Ce comité est présent sur internet ; il organise surtout des manifestations aux anniversaires de la mort de Clément, comme d'autres le font en diverses villes de France ou à l'étranger.

C’est aussi à cela que servira peut-être le procès des agresseurs de Clément qui s’ouvrira bientôt.

Les suites judiciaires de la mort de Clément : enquête et procès

 

Quelques mots sur ce procès et sur l’enquête : les auteurs de l’agression ont été identifiés, dès le lendemain, par les services de la préfecture de police de Paris, sans doute sur renseignement d’un indicateur (Ayoub lui-même ?)

 

Ils ont été arrêtés et les deux principaux agresseurs (Esteban Morillo et Samuel Dufour) ont été placés en détention provisoire. Ils ont été libérés au bout d’un an environ.

 

L’instruction a été clôturée en 2017 (plus de quatre ans après les faits…) par la mise en accusation d’Esteban Morillo et de Samuel Dufour devant la Cour d’assises de Paris pour crime de violences volontaires en réunion et avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Mais Esteban Morillo a fait appel de cette mise en accusation : il conteste toujours l’usage d’arme. Nous attendons la décision de la chambre de l’instruction.

A partir de là, il faudra encore attendre, sans doute un an environ, pour que le procès se tienne.

 

Qu’en attendons-nous ?

Essentiellement que la vérité soit dite publiquement sur les circonstances de l’agression et que la dimension politique de cette agression soit clairement affirmée.

 

Nous voulons qu’on arrête de prétendre qu’il s’agissait d’une simple bagarre qui aurait mal tourné entre bandes rivales violentes, renvoyées dos à dos.

 

Le fait que l’intention de tuer n’ait pas été retenue ne nous choque pas : il est probable que Morillo n’ait pas voulu tuer Clément, même s’il a fait usage d’un poing américain et l’a frappé avec une grande violence.

 

Mais il est insupportable que l’on cherche à dépolitiser l’action antifasciste et à réduire ce combat militant à la recherche de la confrontation physique. Ce qui nous importe, c’est que l’on reconnaisse la légitimité de cette action.

Oui, nos fils, nos frères, nos camarades nous manquent, et si leur absence est si douloureuse, c’est parce qu’ils sont omniprésents dans nos esprits et nos cœurs. Non pas pour nous empêcher de vivre, mais, au contraire, pour nous bousculer et nous appeler à vivre autrement.

Le Comité pour Clément regroupe ses amis, proches et camarades et travaille en étroite collaboration avec sa famille.

Il s’est fixé comme objectifs de suivre les différents procès, d’organiser une campagne politique afin que nul n’oublie Clément et de récolter des fonds afin de se donner les moyens de son action.

Le comité utilisera tous les moyens légaux à sa disposition pour s’opposer à ceux qui tenteraient de salir la mémoire de Clément.

Le Comité pour Clément utilisera différents supports de communication pour appuyer et diffuser son action ; les différentes informations sur nos activités sont disponibles sur notre site :

Clément nous a laissé en héritage de merveilleuses rencontres, un appétit d’une société plus juste et plus fraternelle, un élan pour agir.

 

A Clément, ce fils que nous avons perdu, s’ajoutent désormais tous ces jeunes qui ont été tués par des violences similaires.

 

Ce sont toutes ces vies arrachées que nous avons à vivre à fond en plus de la nôtre.

Dimanche 23 Juin 2013, c'est devant l'Opéra de Paris que nous somme venus par milliers et de toute la France afin de rendre hommage à notre camarade, notre frère, Clément, assassiné le 6 juin 2013.

Ni Oublis, Ni pardons,

 

 

Yolanda González - Le 13 avril 1980, cinq membres de Fuerza Nueva ont enlevé et assassiné à Madrid l'étudiante et militante du Parti socialiste des travailleurs, Yolanda González.

 

Lucrecia Pérez Matos - (15 décembre 1959 - 13 novembre 1992) était un immigré dominicaine assassiné à Madrid, victime du racisme et de la xénophobie, le premier à être reconnu comme tel en Espagne.

 

Guillem Agulló (jeune antifa de Valence, assassiné en 1993)

Guillem Agulló fut poignardé par un groupe d’extrême droite fasciste le 11 avril 1993 à Montanejos.

 

Brahim Bouarram, jeté à la Seine le 1er mai 1995 par des membres d’extrême droite en marge de la manifestation du 1er Mai du Front National.

 

Davide Cesare, surnommé « Dax », militant anti-fasciste italien de Rozzano, a été poignardé à mort par deux activistes d'extrême droite à Milan, la nuit du 16 mars 2003. Cesare a été amené à l'hôpital mais est mort dans l'ambulance.

 

Timur Kacharava, était un étudiant en philosophie, jeune antifasciste et vegan. Après une distribution pour Food not Bombs, il est suivi par une dizaine de néonazis qui le poignardent à cinq reprises le 13 novembre 2005,

 

Carlos Palomino un autre jeune assassiné par l'extrême droite d'un coup de couteau dans le cœur dans le métro à Madrid le 11 Novembre 2007.

 

Hervé Rybarczyk, a mystérieusement disparu dans la nuit du 11 au 12 novembre 2011 après un concert à La Chimère (Lilles). En réalité il aurait été assassiné par des membre des JNR comme rite initiatique.

 

Clément Méric syndicaliste à Solidaire Etudiants, membre de l'AFA Paris-Banlieue, assassiné le 5 Juin 2013 à l'age de 18 ans par des Néo-Nazis du groupe Troisième Voie à Paris.

Pavlos Fyssas connu sous le nom de scène Killah est un rappeur et antifasciste grec, à était assassiné à 34 ans le 18 septembre 2013 à Keratsíni, une banlieue d'Athènes par un membre du parti grec d'extrême droite Aube dorée.

 

Francisco Javier Romero Taboada (dit « Jimmy »).

Dimanche 30 novembre 2014, Francisco Javier Romero Taboada est mort à la suite d’une agression fasciste à Madrid. Âgé de 43 ans, celui que ses proches appellent ”Jimmy” laisse derrière lui un enfant de 4 ans. Onze autres personnes résultèrent blessées dans ce qui s’avérerait être un guet-apens d’extrême droite.

 

Heather Heyer, syndicaliste antifasciste de 32 ans a été tuée le 12 août 2017, lorsqu'une voiture a foncé, volontairement, dans une foule de contre-manifestants venus s'opposer à un rassemblement unitaire de la droite radicale américaine: néo-nazis, suprémacistes blancs, Ku Klux Klan (KKK).

Cutter & Le Druide (Sang Mêlé) - "NI OUBLI, NI PARDON" : https://www.youtube.com/watch?v=arkmq-d-p7o

En hommage à toutes les victimes du fascisme et des bavures policières.

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